Je vous avais déjà parlé de Phoebe, cette adolescente de quinze ans harcelée à son école et via Internet, et qui avait fini par se suicider. Le procès de ses harceleurs a finalement eu lieu. Ceci est une traduction d’un article que j’ai trouvé via ce lien. La traduction a été faite à la va-vite, je suis désolée si elle n’est pas très bonne.
Très franchement, l’affaire me met mal à l’aise. Tout ce que j'arrive à penser, c'est que j'ai de la peine pour la maman de Phoebe.
C’est terminé
Aucun des six ados mis en examen à la suite du suicide de Phoebe Prince n’ira en prison.
D’après un article d’ Emily Bazelon
Les procès engagés contre six adolescents à la suite du suicide de Phoebe Prince sont terminés.
Lors de la deuxième journée d’audiences, trois autres ados ont admis les faits pour appuyer la thèse des petites infractions. Ils ont tous reçu une probation et effectueront des services d’utilité publique. Et le juge Daniel J. Swords a continué avec chacun de ces cas, ce qui signifie que s’ils vont aux bouts de leurs peines, leurs casiers judiciaires seront blanchis. Les accusations criminelles graves à leur encontre ont été abandonnées.
Sans qu’il y ait eu audience, les procureurs ont également abandonné l'accusation en instance contre un quatrième adolescent, Austin Renaud, qui n'a jamais été accusé d’avoir harcelé Phoebe Prince mais qui a été mis en examen pour viol sur la base des allégations selon lesquelles il avait des rapports sexuels avec Prince quand elle avait 15 ans et lui 18 - une accusation qu'il a toujours niée.
Les procédures chargées de tensions et parfois de larmes habituelles dans un tribunal pour mineurs de Hadley, Mass., ont commencé avec l’audience de Sharon Chanon Velazquez, âgée de 17 ans. Velazquez était accusée de délits très graves après avoir été vue l’an dernier en train de harceler Prince au lycée South Hadley, où Prince, âgée de 15 ans, était en seconde et Velazquez en première. Velazquez a admit avoir harcelé Prince. Le procureur Steven Gagne a énoncé les faits sur lesquels la défense et l’avocat général se sont mis d’accord. Selon lui, en début d’année 2010, Velazquez s’est approchée de Prince dans un des couloirs du lycée et l’a appelée par un nom d’oiseau, assez fort pour que les autres l’entendent. Ensuite, le 8 janvier, Velazquez s’est approchée de Phoebe dans le réfectoire, l’a de nouveau insultée et lui a intimé très fort de garder ses distances avec le petit copain de Flannery Mullins, Austin Renaud. Selon Maître Gagne, Velazquez s’est de nouveau approchée de Prince plus tard dans la journée, cette fois-ci en cours de latin. "Velazquez a réprimandé Prince sous le nez d’autres élèves," a déclaré Maître Gagne, et un des élèves a témoigné que Prince était "physiquement bouleversée." Prince à rapporté à un des principaux adjoints de South Hadley High ce qui avait eu lieu. Quand il parla à Velazquez, elle avoua s’en être prise à Phoebe en cours de latin.
Flannery Mullins, aujourd’hui âgée de 18, a admis avoir semé le trouble au cours d’une assemblée scolaire (c’est-à-dire un rassemblement d’élèves) et avoir commis une violation des droits civils, même si pour ce qui est de la seconde offense, elle a pris la responsabilité des actions de Velazquez. Selon Maître Gagne, en janvier 2010, Mullins entendit des rumeurs selon lesquelles Renaud avait eu une relation avec Prince. Le 6 janvier, durant un cours d’éducation physique, Mullins "exprima par oral sa frustration à ce sujet." Prince n’était pas présente mais Mullins annonça à une camarade de classe que "quelqu’un devrait lui botter le cul." Elle déclara également à son prof de gym qu’elle était aussi en colère. Selon Maître Gagne, ces faits supportent l’accusation d’avoir mis du désordre lors d’une assemblée scolaire, ou un cours d’EPS.
Toujours selon le procureur, des élèves ont entendu Mullins faire des commentaires désobligeants sur Prince entre le 8 et le 10 janvier. Il ajouta que, "on a pu entendre Velazquez dire à Mullins qu’elle était prête à frapper Prince ou à demander à quelqu’un de le faire." Quand les responsables de l’école parlèrent à Velazquez, elle leur annonça qu’elle prenait parti pour son amie, "bien que selon elle, Flannery ne lui avait pas demandé de faire quoi que ce soit en son nom." Selon Maître Gagne, à cause des rumeurs sur la colère de Mullins, Prince sécha des cours pour aller à l’infirmerie. Ceci interféra avec son droit à l’éducation, ce qui constitue une violation des droits civils, selon le procureur.
Ashley Longe, également âgée de 18 ans, a admis avoir harcelé Prince sur la base d’une infraction civile. Maître Gagne a annoncé que Longe avait lancé des propos insultants à l’adresse de Prince dans la bibliothèque de South Hadley High pendant l’heure du déjeuner le jour de son décès, le 14 janvier 2010. Elle a également hurlé après Prince dans le couloir à l’heure de la sortie. Quand elle vit Prince rentrer seule chez elle à pied, Longe lui lança une boîte de boisson vide depuis sa voiture. La boîte ne toucha pas Prince.
La maman de Phoebe, Anne O'Brien, a parlé hier au tribunal, comme elle l’a déjà fait mercredi lors de l’issue des procès de deux autres ados mis en examen à propos du décès de Phoebe. Longe est la seule des six ados pour qui elle eut des paroles gentilles. "Hier, j’ai rencontré Ashley Longe," a déclaré O'Brien. "Même si je ne cautionne pas la façon dont elle a traité Phoebe, elle est la seule à avoir reconnu ce qu’elle a fait." O'Brien a dit qu’elle ne voulait pas discuter de ce dont elle a parlé avec Longe, mais a ajouté "je suis très satisfaite du fait que la seule personne qui a pris ses responsabilités et a manifesté des remords sincères, ce que nous avons demandé depuis le 14 janvier, est Ashley Longe."
Au contraire, O'Brien avait auparavant accusé Velazquez de "terroriser" Phoebe. "N’aurait-elle jamais pu s’arrêter, respirer un bon coup et réaliser que ce n’est pas bien de plonger un être humain dans un pareil abîme de peur et de détresse?" a demandé O'Brien. Elle a également accusé Velazquez d’avoir déclaré, après le suicide de Prince, qu’elle se foutait de la mort de Phoebe. Velazquez se mit à sangloter en entendant cela. Après l’audience, l’avocat de Velazquez nia que sa cliente ait dit quoi que ce soit de ce genre. Il n’avait pas vu les déclarations de Mme O'Brien avant l’audience. Cette accusation n’apparaît pas non plus dans le rapport du procureur d’arrondissement sur la conduite de Velazquez. Son avocat a souligné le fait qu’elle n’a admis que les faits exposés par Maître Gagne lors de l’audience. "J’ai dit dès le premier jour que les charges visant à la tenir criminellement responsible de la mort de Phoebe Prince seraient rejetées ou qu’elle serait acquittée," a-t-il déclaré. "C’est ce qui se passe aujourd’hui."
Les avocats de Mullins ont fait une déclaration en son nom et en celui de sa famille pour exprimer "leur plus grande sympathie" à la famille de Prince, "dont la mort fut une tragédie à bien des niveaux, nous le reconnaissons tous." Toujours selon cette déclaration: "Aujourd’hui, nous reconnaissons qu’il nous faut nous montrer plus civilisés et compatissants les uns envers les autres dans la vie de tous les jours. … Le bureau du procureur général du nord-ouest reconnaît également qu’on fait payer trop cher pour ces questions."
Elizabeth Scheibel, le procureur général qui s’est occupée de l’affaire au début et qui a depuis quitté le bureau, n’est pas d’accord. Dans une déclaration, elle considère les charges comme "appropriées." Le nouveau procureur général, David Sullivan, a également défendu les charges lors d’une conférence de presse.
Et cependant la question demeure: si les procureurs pensaient qu’ils pouvaient prouver que les cinq ados accuses de violation des droits civils ont cause le suicide de Phoebe, pourquoi ont-ils laissé ces gosses en liberté sous surveillance et, à l’exception de l’un d’eux (Sean Mulveyhill), avec la promesse d’un casier judiciaire blanchi? S’ils ne pensaient pas pouvoir le prouver, pourquoi une accusation aussi brutale et qui attirait autant l’attention?
Selon l’American Bar Association (association américaine du barreau), les procureurs ne devraient porter des accusations que quand ils savant qu’ils disposent de preuves suffisantes pour les appuyer.* Depuis plus d’un an que je couvre cette affaire, il est difficile pour moi de concilier ce devoir avec la façon dont ces cas se sont déroulés. "Si on harcèle quelqu’un à mort, c’est un meurtre," m’a expliqué Joseph Kennedy, professeur de droit criminel à l’université de Chapel Hill, en Caroline du Nord, quand je l’ai appelé plus tôt cette semaine. "Mais si on harcèle quelqu’un, que cette personne se tue et que ce n’est pas quelque chose que vous aviez anticipé, ce n’est pas un crime." Même si le bureau du procureur d’arrondissement ne le dira pas, la résolution de cette semaine signifie peut-être que les procureurs ont dû accepter cette affirmation.
Correction, 9 mai 2011: A l’origine, cette phrase disait que "l’éthique oblige les procureurs à n’amener des charges qu’ils peuvent prouver dans la limite d’un doute raisonnable." Selon les normes éthiques de l’état du Massachusetts, les procureurs peuvent porter des accusations qui sont soutenues par une cause probable. L’association du barreau d’Amérique met la barre plus haut.